Le poivre, culture et agriculture
Que ce soit le poivre noir ou les autres types de poivre, les baies de poivre que nous consommons sont le fruit d’une liane, plutôt répandue sous des latitudes tropicales. À l’état naturel, on la retrouve en Inde et en Indonésie et au Sri Lanka, où vous pourrez trouver des lianes de piper nigrum dépassant les dix mètres de longueur. Nous revenons ici sur la plante à l’origine du poivre, sa culture et ses spécificités.
Piper nigrum, piper longum : une épice qui n’aime pas le froid
La liane à l’origine de notre baie emblématique piper nigrum L. appartenant à la famille des pipéracées est incapable de résister au froid. Il faut attendre trois ans pour que le jeune poivrier donne du poivre. Le poivrier s’élève parfois jusqu’à 10 mètres et produit des petites grappes de grains qu’il faut détacher à la main. La liane ne survit pas dans un environnement où les températures descendent sous les 10 degrés (Celsius), et préfère un biome où les températures minimales annuelles ne descendent pas sous les 15 degrés.
Le poivre est une plante de sous-bois et de forêts tropicales, la liane n’apprécie guère le contact direct avec le soleil. Les environnements chauds et ombragés sont plus susceptibles de favoriser sa pousse. Les poivriers sont des lianes épiphytes qui se posent sur un tuteur lequel apporte souvent de l’ombrage.
La floraison du poivre intervient en été, et c’est à la fin de cette saison que les baies ( les fruits de poivrier) se forment, que l’on appelle communément « grains de poivre » . D’ailleurs, la catégorisation du poivre par ses couleurs est uniquement liée à la maturité de la baie au moment de la récolte et sa méthode de préparation :
- Le poivre vert est récolté largement avant maturité.
- Le poivre noir est récolté juste à maturité.
- Le poivre blanc est récolté à maturité avancée (on lui enlève le péricarpe après la récolte, ce qui explique la couleur blanc crème de la baie que nous observons dans nos cuisines).
- Le poivre rouge est un grain cueilli à une maturité avancée, puis séché à l’ombre pour conserver sa couleur.
Enfin, il faut noter que la diversification des lieux de production du poivre a eu un impact non négligeable sur son intérêt culinaire. En effet, la liane produit des baies dont le goût est en partie lié à la composition du sol et de l’environnement de pousse. Le poivre est donc une plante qui se diversifie en fonction des terroirs sur lesquels elle est cultivée.
Le poivre gris quant à lui n’est pas lié à un degré de maturation de la baie, il s’agit simplement de la couleur obtenue par le mélange du poivre (dont l’intérieur est blanc) et du péricarpe noir, lorsqu’il est concassé. Nous ne proposons pas de poivre gris.
Le poivre noir est endémique de l’Inde. Avec son drapé froissé noir, le poivre est traditionnellement désigné comme le roi des épices en Inde. Aujourd’hui, les poivriers poussent presque sur tous les continents, Asie, Afrique, Amérique du Sud et même sur des îles reculées. Vous avez peut-être entendu parlé du poivre de Kampot (Cambodge), du poivre du Sri Lanka, de Madagascar ou encore du poivre de Belém au Brésil. Le pays aujourd’hui le plus gros producteur de poivre est le Vietnam. Cependant, le berceau du poivre se trouve au sud de l’Inde sur la côte Malabar.
Une épice cultivée selon des règles précises
En Inde, au Sri Lanka, la récolte du poivre se fait entre les mois de janvier et de février en fonction des propriétés gustatives recherchées, comme nous l’avons vu plus haut, mais aussi en fonction des territoires et de leurs spécificités climatiques. La récolte au Vietnam et au Cambodge démarre en février pour s’achever en mai. Le dérèglement climatique peut modifier le calendrier des cueillettes. Dans tous les pays avec lesquels nous travaillons, la cueillette du poivre est faite exclusivement à la main par les fermiers.
Selon les terroirs, la culture du poivre est différente.
En Inde et au Sri Lanka, les poivriers se développent dans les forêts et des zones de culture en agroforesterie. Les fermiers avec qui nous travaillons cultivent le poivre en agriculture certifiée biologique ou raisonnée et dans le respect de la biodiversité. Ce ne sont donc pas des champs de poivre ; ce sont des fermes dans la forêt où poussent aussi bien du café, du cacao que de la cardamome.
Au Vietnam et au Cambodge, la culture du poivre est une monoculture. Nous avons fait le choix de travailler avec des plantations à taille humaine et qui travaillent en agriculture biologique ou de manière raisonnée.
La culture du poivre s’étant fortement développée, les méthodes de production ont permis certains ajustements. Le séchage au soleil va favoriser un meilleur développement des arômes du poivre.
La culture en serre notamment, s’est répandue de manière confidentielle. Avec les techniques modernes de contrôle de l’hygrométrie, nous voyons des exploitations de poivrier se développer au-delà des latitudes tropicales. Ces cultures ne permettent pas toujours, cependant, de retrouver les goûts propres à un terroir spécifique. Les poivres que nous valorisons ne sont pas cultivés sous serre.
Acheter vos poivres au sein de la collection du catalogue Épices Rœllinger, c’est l’assurance de connaître le terroir d’origine de votre épice, grâce aux relations étroites que nous maintenons avec les fermiers producteurs. Afin de garantir une qualité supérieure, nous sélectionnons nos producteurs-partenaires en fonction de leur méthode (respect du sol, refus des intrants chimiques, qualité du battage et du temps de séchage au soleil, précision du tri, etc.).
Les plantes cousines du poivre
Certaines plantes produisent aussi des baies ou des coques contenant de la pipérine, dont l'intérêt gastronomique est plébiscité. Cependant, on parle bien ici de plantes différentes, qui ne sont ni du poivre noir, ni du poivre long, mais qui en partagent souvent les bienfaits.
On peut noter par exemple :
- Le Zanthoxylum simulans (qui donne le poivre de Sichuan), qui appartient à la famille des rutacées, et dont on récupère la coque du fruit pour produire l’épice. Il s’agit d’un arbuste et non d’une liane, plus facile à cultiver que le piper nigrum car il est moins sensible aux variations climatiques.Ces poivriers rustiques s’acclimatent à nos jardins.
- Le Schinus terebinthifolia (qui donne ce que l’on appelle parfois le poivre rose ou « baie rose »), qui appartient à la famille des anacardiacées. Plus connu sous son appellation de “poivrier d’Amérique”, cet arbre produit des baies roses qui sont aussi utilisées pour préparer des boissons, des sauces ou une marinade.
- Le Pimenta Diodica ou Pimenta officinalis (que l’on appelle le poivre de Jamaïque) est aussi un arbre de la famille des myrtacées. Ce n’est ni un poivre, ni un piment en réalité. Appelé également "tout épice" ou "quatre épices" ou encore "bois d'Inde", cette baie possède le parfum et le goût à la fois du poivre, de la cannelle, du clou de girofle et de la muscade.
Les grains poussent sur un arbre aux feuilles larges et luisantes, ils sont cueillis encore verts. Puis séchés au soleil plusieurs jours, ils prennent alors une couleur brune.
Pour en savoir plus sur notre épice emblématique, n'hésitez pas à vous renseigner sur l'histoire du poivre et son utilisation en cuisine.
Acheter des poivres de qualité
La culture du poivre, de l’Asie vers l’Afrique
Historiquement, la production mondiale de poivre est dominée par l’Asie, et notamment par l’Inde. Depuis 2001, le Vietnam est le premier pays producteur et exportateur mondial de poivre du genre piper. Les poivres confidentiels du Vietnam sont ceux de Phu-Quoc, une île vietnamienne située au large des côtes du Cambodge, que vous trouverez sur notre site. En 2008, le Vietnam génère près de 34% de la production mondiale, avec ensuite l’Inde (19%), l’Indonésie (9%), la Malaisie (8%), la Chine (7%) et le Sri Lanka (6%). Seul intrus dans cette hégémonie asiatique, le Brésil détient 13% de la production mondiale. Cependant, d’autres acteurs essayent de se faire une place dans ce marché très concurrentiel, à l’image du Cambodge. À la fin du XIXème siècle, sous l’impulsion des autorités coloniales françaises, la production du poivre piper nigrum se développe dans la province de Kampot. Une production intensifiée pour produire une épice de qualité, dont l'existence va être menacée par le mouvement militaire des Khmers rouges et leur accession au pouvoir en 1975. Sous leur tutelle, les champs de culture poivrière sont remplacés par des rizières, menaçant grandement la survie de l’art traditionnel de la culture du poivre de Kampot. Le maintien de sa production n’est rendu possible que par la transmission d’anciennes familles d’agriculteurs, pour un retour progressif au premier plan à la fin du XXème siècle, et une reconnaissance mondiale avec l’acquisition d’une IGP (indication géographique protégée) délivrée en 2010. Une qualité reconnue dont vous pourrez profiter sur notre site avec pas moins de 6 poivres de Kampot aux notes aromatiques très différentes.
Si l’Asie demeure le mastodonte de la production mondiale de poivre, l’Afrique commence à se faire une place de choix à travers des productions, certes mineures en volume total, dont la qualité et l’originalité aromatique sont très appréciées des consommateurs. Côte d’Ivoire, Bénin, Madagascar, et bien sûr le Cameroun, autant de pays qui se sont intéressés à la culture du poivre afin de proposer des épices très différentes des autres produits du marché, notamment grâce à une culture des plantes soumises à des conditions climatiques et des sols bien spécifiques au continent africain.
Une épice élégante et puissante dont la finesse aromatique n’a rien à envier aux autres variétés des pays d’Asie.
Ce poivre est cultivé dans une petite plantation selon les principes de l’agriculture biologique.